Paroles de Profamille
Des participants à Profamille ont souhaité témoigner de leur expérience. Proches d'une personne atteinte de troubles schizophréniques, ils disent ici comment ils ont "vécu" le Programme, ce qu'il leur a apporté, à eux et à leur entourage. Ces colonnes sont également ouvertes aux personnes qui vivent avec une schizophrénie et dont les proches ont suivi Profamille.
Par souci de préserver l'anonymat des proches malades, nous n'avons pas non plus dévoilé le nom de leurs parents, qui ont fait le choix de donner leur prénom ou seulement sa lettre initiale.
Ma sœur était malade en Italie, et moi installée en France, lorsque j’ai entendu parler de Profamille à la télévision. Je n’ai pas eu le temps de noter un contact, j’ai cherché à me renseigner via l’Unafam de ma ville. Et j’ai finalement participé à leur groupe « frères et sœurs » puis à leur groupe Prospect. Ces deux premières expériences ont été positives dans la mesure où elles m’ont fait comprendre deux choses : qu’il fallait garder un espace pour soi, au risque de craquer, et qu’il fallait des « outils » pour aborder la maladie.
Thomas a aujourd’hui 23 ans. Depuis la maternelle, il s’est toujours montré sur-intelligent, hyperactif, très sociable, faisant les 400 coups, ne travaillant pas, réussissant tout, comme le bac qu’il a eu avec mention Bien sans le préparer. C’est après le lycée que les problèmes sont apparus.
Mon compagnon, avec lequel nous avons maintenant une petite fille, avait eu une dépression avant notre rencontre. Mais, pendant six ans, il a été parfaitement bien, sans traitement ni suivi. Il travaillait en tant que technicien et faisait en même temps des études en formation continue pour devenir ingénieur. Il est très courageux, il accorde beaucoup d’importance au travail, comme moi d’ailleurs. Alors qu’il venait de changer d’emploi tout en continuant à rédiger son mémoire de fin d’études, en 2013, il a eu une rechute.
Notre fils Jonathan a 36 ans. Il est malade depuis 16 ans et il a pratiquement toujours été en hospitalisation depuis. Le facteur déclenchant a été un très grave accident d’automobile qu’il a eu à 20 ans avec son amie et dans lequel elle a été tuée. Ses six premières années n’ont été qu’une hospitalisation continue dans un hôpital de Reims, sans rien d’autre que les médicaments. C’était un vrai « mouroir ». Nous parents n’étions absolument pas considérés et encore moins associés.
Pendant un an et demi, mon fils était dans sa période comment dire… de nuages. On voulait le tuer, il rampait dans le couloir… puis ça a passé peut-être grâce à la psychiatre de ville qu’il voyait. Mais j’en avais quand même assez car sa vie était difficile.
Un voisin dont le fils est bipolaire m’a parlé de l’Unafam dans la ville voisine. J’y suis allé.
Une dame m’a dit «vous faites comme vous le décidez mais il n’y a qu’une chose à faire c’est de le faire hospitaliser».
Un jour, un interne m’a dit : « Votre fille est schizophrène, je vais vous expliquer. Ça ne sert à rien de ne pas vous le dire ». Cela faisait sept ans qu’on parlait de troubles de l’humeur, du comportement, tous les signes étaient là. Tout vaut mieux que de ne rien dire et il faut dédramatiser l’annonce du diagnostic, parce que ceux qui le reçoivent sont aussi mal à l’aise que ceux qui l’annoncent. Un langage probabiliste qui dise qu’il est probable que son proche soit atteint de schizophrénie, qu’on va tout faire pour cette maladie, c’est mieux que de tourner en rond, même si on doit revenir sur le diagnostic.
Il y avait eu des signes avant-coureurs chez notre fille (sommeil, alimentation, isolement…), mais comme nous ne les avons compris qu’après coup, tout a commencé pour nous à la fin de son cursus à l’université.
Mon fils Ben a 35 ans. Il est malade depuis 14 ans. Son diagnostic est flou, il oscille entre schizophrénie et troubles bipolaires ; les médecins n’ont pas tranché. Il vit séparé et il a une petite fille, dont il a du mal à s’occuper ; alors le plus souvent, c’est moi ou son autre grand-mère qui l’élevons.
Je pense que l’on sait soi-même si on est mûr pour ce genre de formation. Et, de toute façon, il y a la réunion de présentation du programme avant pour se décider et s’inscrire. Ce jour-là, la psychiatre de Profamille qui nous a expliqué le programme m’a immédiatement convaincu. Je l’ai sentie tout de suite tellement proche de nous et des malades que je savais que ce serait intéressant. Et, de fait, j’en ai tiré un immense bénéfice.
Il y a longtemps que j’avais entendu parler de Profamille à une conférence de l’Unafam. J’avais aussi vu une affichette à la maison des usagers de l’hôpital Sainte-Anne à Paris. J’avais compris que c’était un stage important pour apprendre à gérer la maladie au quotidien. Mais à l’époque, je vivais avec mon fils cadet, Camille - qui a aujourd’hui 29 ans - qui était déjà diagnostiqué, et qui faisait tellement de bêtises que je ne pouvais pas m’absenter. A partir de 2012, il n’a plus habité chez moi, c’est alors que j’ai décidé de faire Profamille. J’en avais d’autant besoin que mon fils aîné, Gabriel (31 ans), qui, lui, n’était pas encore diagnostiqué, avait aussi des problèmes de dépression, de retrait social... Son père, chez qui il vivait, ne voulait pas voir sa situation. Voilà dans quel état d’esprit, je me suis inscrite pour suivre le programme à Rueil-Malmaison en 2014.
Enfant et adolescent précoce avec des comportements que je considérais à risques, mon fils B. a présenté ses premiers troubles psychiques en 2002, à l’âge de 16 ans. Ils ont été déclenchés par la prise de toxiques. J’ai dû le faire hospitaliser d’urgence. Son psychiatre a alors évoqué une psychose avec une réserve sur le diagnostic en raison de son jeune âge. En tant que mineur, il a eu droit à une prise en charge médico-psychologique bien encadrée et il a pu reprendre un projet scolaire avec des réussites à la clé. Les véritables difficultés sont apparues à sa majorité lorsqu’il a abandonné le traitement, ses études et changé de département pour aller vivre chez son père en Seine et Marne.
A cette époque, nous étions en conflit permanent ma fille et moi. Un jour j’ai cherché sur internet des infos sur la schizophrénie. Je suis tombée rapidement sur une émission de télévision en replay, sur France 5, de Michel Cymès. Il parlait de Profamille. J’ai été convaincue dans les 5 minutes. J’ai tout de suite pensé, c’est génial, c’est ce qu’il me faut. J’ai contacté Dominique Willard, la responsable Ile-de-France. C’était en mars. En juin, j’avais la chance d’être prise à la session suivante. Aujourd’hui, je suis en 2e année.
J’avais participé à un groupe de paroles à l’Unafam avec mon mari. Lui a continué, moi je suis partie. Ca ne m’aidait pas concrètement d’entendre les autres parents parler et la psychologue faire ses commentaires. Je dirais même que cela me faisait plus de mal que de bien. Mon fils allait mal, il cassait tout. J’avais envie d’aide, pas de paroles.