La psycho nutrition, une approche indispensable pour la santé mentale

Caf'Conf'

Le 20 Avril 2021, nous avons eu le plaisir d’accueillir Guillaume FOND dans nos Caf’Conf’, maintenant réguliers. Vous trouverez, ci-dessous, un résumé succinct de son intervention. N’hésitez pas à écouter l’audio joint et à suivre d’autres interventions proposées en fin d’article. Le Dr G. FOND est médecin, psychiatre, Responsable Centre Expert Schizophrénie et Dépression Résistante, Hôpitaux Universitaires de Marseille. Il est aussi auteur de nombreux articles scientifiques, d’ouvrages, de vidéos d’enseignement et de diffusion. A côté de son domaine d’expertise de la schizophrénie, le Dr FOND travaille sur le sujet de la nutrition depuis de longues années et plus précisément, « l’amélioration du soin des personnes en psychiatrie », thème qui déborde largement le cadre de la schizophrénie.

Dans un premier temps, le Dr FOND a développé les étapes qui l’ont conduit à s’intéresser et individualiser l’influence de l’alimentation sur le psychisme, objet de l’intervention de ce Caf’Conf’.

Petit historique

A l’origine (Il n’y a pas si longtemps que cela puisque c’était au XXème s), le sujet n’était connu que sous la dénomination anglosaxonne de « life style » imparfaitement traduite par « mode de vie ». La découverte des médicaments se faisait souvent par sérendipité (le hasard !), notamment s’agissant des neuropsychotropes. De nombreuses questions étaient soulevées quant au mécanisme d’action dopaminergique.

Les années 90 ont vu le développement du séquençage du génome, qui a souligné le rôle du système HLA (système d’Histocompatibilité dont le rôle est majeur dans les greffes d’organes – DAUSSET, prix Nobel). L’immunologie entrait en force dans la compréhension des mécanismes de fonctionnement du cerveau, et franchissait la barrière hémato-encéphalique : le cerveau n’était plus cet organe isolé qui « secrétait « la pensée », mais à l’instar du reste du corps, il était concerné par l’immunité. En 2017 la découverte de la « théorie du sommeil « démontrait l’existence de 2 phases dont l’une au cours de laquelle le liquide céphalo-rachidien (liquide baignant le cerveau enveloppé par les méninges) est épuré des déchets métaboliques.

Cadre du sujet abordé dans ce Caf’Conf’

Seront développés dans ce Caf’Conf’, les « outils » ou moyens adjuvants aux traitements antipsychotiques classiques (Clozapine, Olanzapine, Abilify …) en abordant ainsi l’influence de l’alimentation sur le psychisme.

Dans notre alimentation, au sens large (ensemble des « ingesta »), tous les facteurs de risques classiques connus et répertoriés, en cause dans des pathologies telles que l’hypertension artérielle – les cancers des voies aérodigestives supérieures – le diabète- l’hyperlipémie, etc …. s’avèrent « toxiques »  pour les pathologies mentales. Ainsi la psychonutrition au sens large inclue notamment le tabac et l’alcool, par exemple.

Cette donnée, cependant, ne fait pas encore consensus parmi les psychiatres et les recommandations diététiques, en pathologie psychiatrique, l’abord du sujet de la nutrition, de l’activité physique et sportive ne sont pas encore des pratiques courantes lors d’une consultation avec les patients alors que cela est une bonne manière d’établir un contact et d’ouvrir une relation. G. FOND précise bien que l’alimentation ne soigne pas les troubles psychotiques ; en revanche, dans la population des patients atteints de schizophrénie, une partie des symptômes est liée à leur mode de vie (en particulier alimentaire) auquel peut s’ajouter la dépression. En effet, l’état dépressif   est particulièrement fréquent chez les patients atteints de schizophrénie : 1/3 environ, et dans cette proportion on retrouve 1/3 diagnostiqués et traités, 1/3 non traités malgré le diagnostic, 1/3 non diagnostiqués non traités).

Or, les méta analyses de la littérature (études analytiques et synthétiques d’un plus ou moins grand nombre publications sur un sujet commun) établissent clairement les liens entre états dépressifs et régimes alimentaires. Ainsi aux symptômes négatifs ou aux états dépressifs que la personne peut présenter, le mode de vie, l’alimentation, le tabac, les addictions (sucre, alcool etc…) vont renforcer ou accroître ses symptômes.

Pour exemple, la motivation et la motivation au changement qui est une donnée majeure de la prise en charge et du rétablissement des patients pourra être émoussée par une psychonutrition chaotique.

Guillaume FOND nous propose ensuite un petit horizon des aliments néfastes et des bénéfices de certains régimes.

L’effet bénéfique du jeûne est envisagé :  Cette restriction calorique pendant plus de 6 h rencontre un consensus international pour l’objectif de la perte de poids. L’allongement de ce temps de jeûne est un moyen simple à disposition.

Au plan qualitatif, les aliments « transformés » s’avèrent particulièrement néfastes pour les patients, et donc à bannir, en raison de leur forte teneur cumulée en graisses et en sucres (notamment sucres « masqués »). Les boissons hyper sucrées des distributeurs sont à éviter, ce d’autant plus qu’ils sont volontiers installés dans les Hôpitaux (!!). La prise excessive de poids, le surpoids, l’obésité (appréciation notamment par étude du périmètre abdominal), sont clairement associés à l’altération des fonctions cognitives et à la dépression chez les patients atteints de schizophrénie. L’échec de la prise en charge   de ces authentiques facteurs de risque est souligné au sein des centres experts. Parmi les recommandations de « bonnes pratiques », le « régime méditerranéen » (légumes du soleil – fruits …) joint à l’évitement des aliments « ultra transformés » fait consensus.

ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS

Comment lutter contre les effets médicamenteux ? Sur la « satiété », il est connu que Olanzapine – Clozapine (deux antipsychotiques très largement prescrits) majorent la sensation de faim : on peut leur opposer le choix d’une alimentation riche en protéines, dont l’action « coupe-faim » est établie.

La constipation peut se traiter par une alimentation riche en fibres.   Ainsi l’association protéines + fibres s’avère un duo efficace, auquel on peut ajouter des œufs (1à 2/J)

L’intérêt des laitages? il fait actuellement débat en raison de la diversité de l’équipement enzymatique de chacun d’entre nous : la réponse est par conséquent cas d’espèce et individuelle.

Les compléments alimentaires? leur intérêt est maintenant établi, et on peut parler de « trépied de la santé mentale ».

– Les Oméga 3 : aussi bien en phase aigüe qu’en phase « d’entretien ». Si leur effet peut apparaître bénéfique dans la pratique du Dr FOND, il n’y a pas de preuve scientifique démontrée dans la schizophrénie. Du reste, selon le Dr FOND, ceci est à rapprocher du fait qu’à ce jour, on ne dispose pas de preuves que les médicaments antidépresseurs aient un effet démontré scientifiquement (étude statistique, double aveugle – placebo) dans la schizophrénie, ce qui n’empêche de les prescrire largement, sous forme de compléments médicamenteux alimentaires.

Les aliments riches en Omega3 peuvent valablement faire partie de l’alimentation. Il s’agit des produits :

Animaux : poissons gras frais : ne pas dépasser consommation 1/ semaine en raison du risque de mercure

Végétaux : noix, noisettes, avocats : ils contiennent dans une moindre mesure les Oméga3. Une petite quantité à 16h peut servir de « coupe-faim ».
– La N-acetyl-Cystéine (MUCOMYST*) en sachets, à dose de 600mg/J , est un acide aminé qui s’avère efficace dans la schizophrénie , sans que le mécanisme en ait été bien compris  . Son rôle serait principalement anti-oxydant.
– La Vitamine D mérite d’être prescrite quasi systématiquement (1 ampoule buvable / mois), sachant qu’environ 27% des patients sont carencés. Le dosage sanguin de la 25 OH vitamine D est réalisable simplement en laboratoire.

Café, Thé? En dessous de 3 tasses /jour, l’effet anti-oxydant est bénéfique ; au-delà, cela peut majorer l’anxiété. Tabac, cigarette? la mise en œuvre d’un sevrage (patchs transcutanés notamment) fait partie de la pratique quasi systématique du Dr FOND. Cette question s’inscrit dans le cadre d’une action collective sinon nationale, pour mettre en œuvre au sein des services et unités hospitalières qui malheureusement pratiquent hélas – au sein des soignants – le renforcement positif, mais à l’envers. L’Hypnose ? On manque actuellement de données dans le cadre de la schizophrénie. S’agissant de la méditation, des études sont en cours.

Écouter ou réécouter Guillaume Fond lors de notre Caf’ Conf’

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